Veille Juridique du 10 février 2025

VEILLE JURIDIQUE
28 janvier 2025
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25 février 2025
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Veille du 10 février 2025

 

 

  1. 1. CE, 27 janvier 2025, Mme A… B… n°490508, Leb.: l’éventuelle irrégularité de la délibération arrêtant le projet de Plan Local d’Urbanisme (PLU) est sans incidence sur la légalité de la délibération approuvant ledit plan

 

Pour mémoire, la procédure d’adoption ou de révision d’un PLU est divisée en trois grandes étapes : (i) la prescription de l’élaboration, (ii) l’arrêt du projet, et (iii) l’approbation du plan.

 

Dans l’affaire soumise à l’appréciation du Conseil d’Etat, la requérante soutenait, à l’appui d’un recours en annulation contre la délibération d’approbation du plan révisé, que la convocation des conseillers municipaux au cours de laquelle le projet avait été arrêté était insuffisante et ce, pour deux raisons :

  • d’une part, la convocation ne précisait pas suffisamment que ce point était à l’ordre du jour du conseil municipal, en méconnaissance de l’article L. 2121-10 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) ;
  • d’autre part, elle n’était pas accompagnée de la notice explicative de synthèse prévue par l’article L. 2121-12 du CGCT.

 

Le Conseil d’État juge toutefois que, dans le cadre d’un recours contre la délibération approuvant le PLU, le moyen tiré de l’irrégularité entachant la délibération arrêtant le projet de plan est inopérant.

 

Pour la Haute juridiction, cette décision est justifiée :

  • en raison des spécificités de la procédure d’élaboration ou de révision du PLU, qui impliquent que le conseil municipal se prononce sur le contenu du Plan lors de son adoption définitive ou de sa révision ;
  • et en raison de l’absence d’effet propre de la phase arrêtant le projet de Plan avant l’enquête publique.

Cette décision s’inscrit dans la lignée de la jurisprudence Saint-Bon-Tarentaise, par laquelle le Conseil d’Etat avait jugé que l’illégalité de la première délibération (prescrivant l’élaboration ou la révision du PLU) ne pouvait pas être utilement invoquée contre une délibération arrêtant le projet du Plan (CE, 5 mai 2017, Saint-Bon-Tarentaise, n°388902, Rec. Leb.).

 

délibération approuvant ledit plan.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  1. CE, 29 janvier 2025, Société Batigère Habitat, n°489718, Tab. Leb.: Précisions sur l’appréciation du critère de « raison impérative d’intérêt public majeur» au sens de l’article L. 411-2 du Code de l’environnement pour un projet de logements sociaux

 

Lorsque la réalisation d’un projet porte atteinte à des espèces protégées, le porteur de projet doit obtenir une dérogation spéciale, laquelle ne peut être accordée que si trois conditions cumulatives, fixées à l’article L. 411-2 du Code de l’environnement, sont caractérisées :

  • Le projet doit répondre à l’un des objectifs limitativement énumérés, au titre desquels figurent la protection « de la santé et de la sécurité publiques ou (…) d’autres raisons impératives d’intérêt public majeur, y compris de nature sociale ou économique (…)» ;
  • Il ne doit exister aucune solution alternative satisfaisante ;
  • La dérogation ne doit pas nuire « au maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées dans leur aire de répartition naturelle».

 

En l’espèce, la Cour administrative d’appel de Nancy, se prononçant sur un projet de 60 logements locatifs sociaux et 18 logements en accession sociale, a considéré que celui-ci ne répondait pas à une raison impérative d’intérêt public majeur (« RIIPM ») suffisante justifiant une dérogation, aux motifs que :

  • La commune respectait déjà les objectifs de la loi SRU en matière de logement social à la date de la décision attaquée ;
  • Aucun élément ne démontrait que le projet était nécessaire pour atteindre ces objectifs ou que le territoire connaitrait une situation de tension particulière en matière de logement social ;
  • Il n’est pas établi que le projet n’aurait pas pu être réalisé sur une emprise foncière moins attentatoire à la conservation des habitats naturels, de la faune et de la flore sauvage.

 

Le Conseil d’Etat considère toutefois que cette analyse repose, en l’espèce, sur une qualification erronée des faits dès lors que :

  1. La construction de ces logements est destinée à permettre à une population modeste d’accéder à la propriété, c’est à dire à assurer le logement des populations les plus fragiles ;
  2. Le taux de logements sociaux de la commune du lieu d’implantation du projet, observé sur une période de 10 ans, était inférieur au seuil de 20% fixé par la loi SRU.

 

En conséquence, l’affaire est renvoyée à la Cour administrative d’appel de Nancy.

 


 

  1. CE, 4 février 2025, Commune de Contes, n°494180, Tab. Leb.: une demande de pièces complémentaires partiellement illégale interrompt le délai d’instruction de la demande d’autorisation d’urbanisme

 

Pour mémoire, lors de l’instruction de la demande d’autorisation d’urbanisme :

  • Une demande portant sur une pièce listée par le Code de l’urbanisme, même non utile pour l’instruction du dossier, interrompt le délai d’instruction et fait ainsi obstacle à la naissance d’une décision implicite d’acceptation.
  • A contrario, le délai d’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme « n’est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n’est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l’urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l’expiration du délai d’instruction, sans qu’une telle demande puisse y faire obstacle. » (CE, 9 décembre 2022, Cne de Saint-Herblain, n°454521, Leb.).

 

Dans sa décision du 4 février 2025, le Conseil d’Etat devait toutefois répondre à une nouvelle question : une demande de pièces complémentaires portant sur une pièce listée par le Code de l’urbanisme mais également sur une pièce non listée par ce Code interrompt-elle le délai d’instruction ?

 

La Haute juridiction répond par l’affirmative et juge que la demande de pièces formulée – partiellement illégale – faisait « obstacle en l’espèce à la naissance d’un permis tacite à l’expiration du délai d’instruction et à ce que la décision de refus de permis de construire en litige soit regardée comme procédant illégalement au retrait d’un tel permis tacite ».

 

 

  1. CAA Marseille, 8 janvier 2025, n°23MA02692: un maire ne peut se fonder sur l’avis défavorable de l’Architecte des Bâtiments de France (ABF) pour délivrer un certificat d’urbanisme négatif

 

En l’espèce, le certificat d’urbanisme négatif délivré par le maire reposait sur deux motifs de refus, dont l’un était fondé sur l’avis défavorable de l’ABF, dont la teneur était reproduite.

 

La Cour administrative d’appel de Marseille considère que la simple reproduction de l’avis de l’ABF ne saurait caractériser une situation de compétence liée, la décision en litige étant également fondée sur un autre motif.

 

Toutefois, la Cour rappelle que la délivrance d’un certificat d’urbanisme, qui n’a pas pour effet d’autoriser la réalisation de travaux ou d’une construction, n’est pas soumise à l’avis préalable de l’ABF, le certificat devant seulement mentionner si le projet est soumis à un avis ou accord d’un service de l’Etat.

Elle en déduit que, s’il était loisible au maire de consulter l’ABF eu égard à la localisation du terrain – objet du certificat –, « il ne pouvait se fonder sur le sens de cet avis, et plus généralement, sur l’atteinte au site susceptible de résulter du projet (…), ce projet n’étant, à ce stade, eu égard à l’objet même du certificat d’urbanisme et à la teneur des pièc