Veille juridique du 14 mai 2025

Veille juridique du 28 avril 2025
28 avril 2025
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Veille juridique du 14 mai 2025

 

 

 

  1. CE, 30 avril 2025, Société Prosper et M.B., n°493959, Leb. : le Juge doit apprécier si un permis de construire modificatif communiqué à la suite d’un sursis à statuer régularise le vice relevé, même en l’absence d’observations des parties sur ce point

 

 

Pour mémoire, les dispositions de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme prévoient que, dans le cadre d’un recours contre une autorisation d’urbanisme, le Juge administratif qui estime qu’un vice entachant l’illégalité de l’autorisation est susceptible d’être régularisé peut surseoir à statuer, afin que le pétitionnaire régularise le vice via une mesure de régularisation.

 

Lorsqu’une mesure de régularisation est notifiée au juge, dans le délai fixé, cette dernière statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations.

 

La légalité du permis de construire est alors appréciée en tenant compte des modifications.

 

Mais, lorsqu’aucune critique n’a été formulée par les parties à l’égard de la mesure de régularisation notifiée, faut-il considérer que le vice est nécessairement régularisé ?

 

Le Conseil d’Etat répond à la négative, considérant qu’il appartient au Juge, même en l’absence d’observations des parties, d’apprécier si la mesure notifiée assure la régularisation du vice qu’il a relevé :

 

« 2. (…) il appartient au juge qui a sursis à statuer sur leur fondement d’apprécier, pour statuer sur le litige lorsqu’une mesure de régularisation lui a été notifiée, si cette mesure assure la régularisation du vice qu’il a relevé quand bien même les parties, invitées à le faire, n’ont pas présenté d’observations devant lui sur ce point. »

 

 

  1. CE, 30 avril 2025, et Mme K. et autres, n°490965, Tab. Leb. : le commissaire enquêteur doit détailler le sens de son avis, notamment au regard des observations formulées en cours d’enquête, alors même que certains éléments du projet feraient l’objet d’un contentieux

 

 

L’enquête publique – consacrée par le Code de l’environnement – « a pour objet d’assurer l’information et la participation du public ainsi que la prise en compte des intérêts des tiers lors de l’élaboration des décisions susceptibles d’affecter l’environnement mentionnées à l’article L. 123-2. Les observations et propositions parvenues pendant le délai de l’enquête sont prises en considération par le maître d’ouvrage et par l’autorité compétente pour prendre la décision » (C. env., art L. 123-1).

 

Dans ce cadre, le commissaire enquêteur ou la commission d’enquête doit établir un rapport destiné (i) à permettre au public, de prendre une connaissance complète du projet de présenter leurs observations, suggestions et contre-propositions et (ii) à l’autorité compétente les éléments nécessaires pour prendre une décision éclairée.

 

Dans la décision commentée, la Haute juridiction administrative précise que :

 

« Si [les dispositions susvisées du Code de l’environnement] n’imposent pas au commissaire enquêteur de répondre à chacune des observations présentées lors de l’enquête publique, elles l’obligent à indiquer, au moins sommairement, en donnant son avis personnel, les raisons qui déterminent le sens de cet avis, sans qu’il puisse renoncer à se prononcer sur tout ou partie du projet, quand bien même certains éléments du projet soumis à enquête publique seraient concernés par une procédure contentieuse en cours à la date de son rapport. »

 

 

  1. CE, 30 avril 2025, A., n°475950, Tab. Leb. : Précisions sur l’exigence de cohérence entre le rapport de présentation et les documents graphiques de la carte communale

 

 

Dans la décision commentée, le Conseil d’État précise les conditions de légalité des cartes communales, en particulier l’appréciation de la cohérence entre le rapport de présentation et les documents graphiques :

 

« 3. Il résulte de ces dispositions que, pour apprécier la cohérence, au sein de la carte communale, entre le rapport de présentation et le ou les documents graphiques, il appartient au juge administratif de rechercher, dans le cadre d’une analyse globale le conduisant à se placer à l’échelle du territoire couvert par le document d’urbanisme, si le ou les documents graphiques ne contrarient pas les objectifs que les auteurs du document ont définis dans le rapport de présentation, compte tenu de leur degré de précision. L’inadéquation d’un document graphique à un objectif du rapport de présentation ne suffit pas nécessairement, compte tenu de l’existence d’autres objectifs énoncés au sein de ce rapport, à caractériser une incohérence entre le document et ce rapport. »

 

 

  1. CAA Lyon, 17 avril 2025, n°24LY02572, C+: l’existence d’une zone d’aménagement concertée (« ZAC ») ne peut fonder un refus de permis d’aménager, mais est susceptible de justifier un sursis à statuer

 

 

Dans l’affaire commentée, une société pétitionnaire a déposé un permis d’aménager en vue de la création d’un lotissement d’habitation sur des terrains situés dans le périmètre d’une zone d’aménagement concertée (« ZAC ») sur la commune de DAIX.

 

La maire de la commune a opposé un sursis à statuer sur cette demande pour une durée de deux ans.

 

Par un jugement du 6 juin 2023, le Tribunal administratif de Dijon a annulé cet arrêté pour insuffisance de motivation et enjoint à la commune de DAIX de réexaminer la demande.

 

En exécution de ce jugement, la maire de DAIX a opposé un nouveau sursis à statuer le 2 août 2023 puis, par un arrêté du 15 septembre 2023, a finalement refusé la délivrance du permis d’aménager sollicité.

 

La Société pétitionnaire a saisi une nouvelle fois le Tribunal administratif de Dijon aux fins d’annulation de ces deux décisions.

 

Par un jugement du 11 juillet 2024, le Tribunal a uniquement annulé l’arrêté du 15 septembre 2023 refusant la délivrance du permis d’aménager.

 

Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Lyon affirme, dans un premier temps, qu’un refus de permis « ne peut être opposé qu’en cas de méconnaissance des dispositions législatives et réglementaires relatives à l’utilisation des sols, à l’implantation, la destination, la nature, l’architecture, les dimensions, l’assainissement des constructions et à l’aménagement de leurs abords, au nombre desquelles ne figurent pas les actes créant une ZAC et décidant de sa réalisation en régie, ou en cas d’incompatibilité avec une déclaration d’utilité publique ».

 

En conséquence, la Cour confirme l’appréciation du Tribunal et juge qu’en opposant l’existence d’une ZAC pour rejeter la demande de permis d’aménager, la maire de la commune de DAIX avait commis une erreur de droit.

 

Dans un second temps, la Cour confirme la légalité du second arrêté de sursis à statuer du 2 août 2023, qui n’est pas fondé sur les mêmes motifs que ceux qui avaient justifié le premier sursis à statuer.

 

La Cour en déduit qu’il n’y a pas lieu d’enjoindre à la commune de DAIX de délivrer le permis d’aménager sollicité.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

  1. Loi n°2025-391 du 30 avril 2025 dite « DDADUE » (loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique, financière, environnementale, énergétique, de transport, de santé et de circulation des personnes), publiée au JORF n°0103 du 2 mai 2025

 

Parmi les nombreuses dispositions de la loi du 30 avril 2025 dite « DDADUE », trois évolutions, susceptibles d’avoir un impact sur les projets immobiliers, méritent d’être soulignées :

 

  • Article 23:  précisions apportées aux conditions permettant d’être dispensé de la dérogation « espèces protégées » ;

 

  • Article 24: modifications du régime juridique des obligations de solarisation et de végétalisation ;

 

  • Article 25 : ajout de la « consommation énergétique » parmi les facteurs pris en compte lors de l’évaluation environnementale d’un projet (à partir du 1er octobre 2025).

 

Concernant la dérogation espèces protégées, l’article L. 411-2-1 du Code de l’environnement, tel que modifié par l’article 23 de la loi susvisée, dispose que :

 

« La dérogation mentionnée au 4° du I de l’article L. 411-2 n’est pas requise lorsqu’un projet comporte des mesures d’évitement et de réduction présentant des garanties d’effectivité telles qu’elles permettent de diminuer le risque de destruction ou de perturbation des espèces mentionnées à l’article L. 411-1 au point que ce risque apparaisse comme n’étant pas suffisamment caractérisé et lorsque ce projet intègre un dispositif de suivi permettant d’évaluer l’efficacité de ces mesures et, le cas échéant, de prendre toute mesure supplémentaire nécessaire pour garantir l’absence d’incidence négative importante sur le maintien, dans un état de conservation favorable, des populations des espèces concernées. (…) »

 

Ces dispositions reprennent substantiellement celles consacrées par le Conseil d’Etat (CE, Avis, 9 décembre 2022, n°463563).

 

Cependant, le législateur introduit une nouvelle condition pour être dispensé de la demande de dérogation, le projet doit désormais inclure « un dispositif de suivi permettant d’évaluer l’efficacité de ces mesures ».